Le K barré : Ꝃ, dans les noms commençant par Ker, une spécificité bretonne qui déroute les généalogistes.
Les généalogistes débutants sont souvent désorientés par cette lettre Ꝃ très présente dans les noms de familles bretons. C’est en effet une abréviation du mot Ker (village) présent dans 20 % environ des noms de lieux bretons. C’est une tradition ancienne, nous précise le site internet An Drouizig (le petit druide) : Ul lizherenn implijet e brezhoneg hag e latin eo ar “K barrennet”. Stummet eo gant al lizherenn K gant ar varrenn a-dreuz dezhi. Gallout a reer gwelout ar “K barrennet” er marilhoù evit anvioù-lec’h pe anvioù-familh. (Le k barré est une lettre utilisée en latin et en breton. c’est un K barré diagonalement. On le trouve dans dans les registres de noms de famille ou de noms de lieux).
Yann Riou a fait la seule étude précise de l’utilisation de cette lettre à partir des archives de Lampaul-Plouarzel : On y trouve Ꝃmaïdic pour Kermaidic, Ꝃsauzon pour Kersauzon. Ꝃebel pour Kerebel.
Si en Bretagne cette abrévation est connue, il n’en est pas de même ailleurs. Á Lyon en 1933, un breton signe Ꝃebel sur son acte de mariage. Il explique que Ker signifie maison, lieu de résidence et obtient le droit de conserver son Ꝃ au ”parfum de terroir” nous relate la presse.
Autre problème, le signe typographique pour l’imprimerie. On écrit donc k’ ou k/ ou parfois k tout seul. On trouve donc des K’ros pour Kerros, K/Gall pour Kergall et Kdevot pour Kerdevot.
Bien entendu, ce particularisme est combattu par l’État français. Première interdiction vers 1895 par le Conseil d’état. Deuxième interdiction en 1955, ce qui fait réagir l’écrivain Yeun ar gow : « War a lavaras, e oa deuet an urzh eus Pariz hag a rae difenn da verraat skritur an anvioù tiegezh. Ne c’helled mui, hiviziken, er skridoù savet el lezioù-barn hag en tiez-kêr, lakaat Ꝃ evit Kêr, da skouer Ꝃnalegenn evit Kernalegenn. « Ur vezh, » emezañ, « n’o devo ken ar Vretoned ar gwir da skrivañ anvioù ‘zo eus o bro evel ma plij ganto! ( Comme on me l’a dit, un ordre était venu de Paris d’interdire l’abréviation des noms de famille. On ne peut plus, dorénavant, dans les actes établis par les tribunaux et les mairies, mettre Ꝃ pour Kêr, par exemple Ꝃnalegenn à la place de Kernalegenn. « Une honte, » dit-il « les Bretons n’auront plus le droit d’écrire les noms de leur pays comme ils le veulent ! ). Néammoins cette tradition a la vie dure puisqu’on trouve à usage privé : un avis d’obsèque de 1988 pour une dame Ꝃvella et une tombe Ꝃhervé par exemple.
Pennad orin / Texte original
« War a lavaras, e oa deuet an urzh eus Pariz hag a rae difenn da verraat skritur an anvioù tiegezh. Ne c'helled mui, hiviziken, er skridoù savet el lezioù-barn hag en tiez-kêr, lakaat Ꝃ evit Kêr, da skouer Knalegenn evit Kernalegenn. « Ur vezh, » emezañ, « n'o devo ken ar Vretoned ar gwir da skrivañ anvioù 'zo eus o bro evel ma plij ganto ! » »
Troidigezh / Traduction
« Comme on me l’a dit, un ordre était venu de Paris d'interdire l'abréviation des noms de famille. On ne peut plus, dorénavant, dans les actes établis par les tribunaux et les mairies, mettre Ꝃ pour Kêr, par exemple Ꝃnalegenn à la place de Kernalegenn. « Une honte, » dit-il « les Bretons n'auront plus le droit d'écrire les noms de leur pays comme ils le veulent ! » »
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Nouvelle revue de Bretagne, N°3, 1947, pp215-316,397. Lire en ligne
Yann Riou, Le k barré d'hier à aujourd'hui, Association Lambaol, 1992, 15p.
An Drouizig, L'écriture du breton : Le k barré, lire en ligne,
An Drouizig, K barennet, lenn en linenn
Yeun ar Gow, Skridoù-Eñvorennoù ha barzhonegoù, Hor Yezh, 2000, 164p. Gwelet war lec'hienn Kuzul ar brezhoneg
Wikipedia, K barré, lire en ligne
Centre généalogique du Finistère, Forum, lire en ligne
Loeiza Alle, «C’est une fierté familiale» : le K barré, cette lettre étonnante qui s’invite dans les noms bretons, in Bretons (Lire en ligne)