1929 : Quand les campagnes découvrent le cinéma muet : Plijadur e vez er sinema (Du plaisir il y a au cinéma !)
C’est dans les années 20 que le cinéma devient véritablement populaire. Paotr Gwezeg (Le gars de Gouezec) raconte en 1929 comment Maria découvre le grand écran. Da gentañ e oa lazhet ar sklerijenn, setu noz pok. Me a garme, petra an diaoul zo ‘vont da dremen ? Gortoz un tammig lar Juli ken vezo alumet an Termaji ! (D’abord on éteint les lumières, il fait nuit noire. Que diable va t’il se passer ? Attend un peu dit Julie que la lanterne magique soit allumé.)
Le projecteur est donc la lanterne magique. Les premières images fusent : Welan bodet war al lizer Aotrouien kaer digant o bizier o zog hir evel ribotoù. Ne oan ket evit o c’hlevet, un tamm skrid mare da vare, siwazh din ouezan ket lenn ! (Sur le drap, je vois un groupe de messieurs avec des cannes et des chapeaux comme des ribots. On ne les entends pas, une inscription de temps en temps mais je ne sais pas lire !).
C’est donc petit Pierre qui lui souffle que c’est le président de la République, le maire de Paris etc
La proximité de l’écran provoque un trouble chez Maria : Biskoazh mije kredet oan anavezet gant tout ar re-se. Beb gwech pa sellont ouzhin en em lakaont holl da c’hoarzhin ha me c’hoarzhe ivez. Un tammig mezh ‘m oa koulskoude, dalc’het ‘m oa ma chupenn bemdeiz, moa ket cheñchet brozh, va zavañcher, va c’hoef oa fank. (Je n’avais jamais imaginé que ces gens me connaissaient. Chaque fois qu’ils me regardaient ils riaient et moi je riais aussi. J’avais un peu honte quand même, j’avais gardé mon gilet et ma robe de tous les jours, mon tablier et ma coiffe étaient sales).
Après les actualités viennent les histoires droles : Tri archer o devoa trapet ul laer a lakas anezhañ en ur c’harr-dre-dan kaer ha ledan…En un taol krenn al laer fall a lampas brav ‘barzh ur c’harr all. Neuze ‘zeraouas ur redadeg, ar yer spontet a nije skañv, ar saout a vreskenne ken a ziframmas ar c’hoarzhadeg ( Trois gendarmes avaient attrapé un voleur. Ils le mirent dans une belle et large voiture. D’un coup le voleur sauta dans une autre voiture et alors commença la poursuite. Les poules effrayées s’envolaient, les vaches partaient queue-en l’air. Un fou rire s’empara de la salle).
Et le mot de la fin de notre vieille paysanne : N’eus ket da lavaret memes tra, Plijadur ‘m oe er sinema ( Il n’y a pas à dire quand même, du plaisir j’ai eu au cinéma).
Pennad orin / Texte original
Troidigezh / Traduction
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Sur l'auteur Paotr Gwezeg
Lukian Raoul, Geriadur ar Skrivagnerien, Al Liamm, cf Jean-François Quaba, p.354.