1837 : La gwerz de la prise de Constantine, épisode sanglant de la conquête de l’Algérie
Depuis 1830, les armées françaises ont pris pied en Algérie. Elles mettront 17 ans à la conquérir. L’émir Abdelkader oppose une résistance farouche aux envahisseurs, en témoigne la bataille de Constantine qui fait l’objet d’une longue complainte en breton : Kemeridigezh Konstantin, kêr grenn meurbet eus an Afrik gant ar Frañsizien vaillant ( La prise de Constantine, ville moyenne de l’Afrique par les vaillants Français).
Le chef arabe local est bien sûr dépeint comme un tyran : Kruel evel un tigr ha kriz evel ur bleiz, Na selaoue nep propoz, na kennebeut nep rezon, N’en doa evit kundu nemet an draïzon (Cruel comme un tigre, impitoyable comme un loup, Imperméable à tout propos et fermé à la raison, il n’a pour conduite que la trahison).
La bataille s’engage avec une violence inégalée : Hon soudarded vaillant diouzhtu vel dre araj a gomañs da gombatiñ Evel tud gwall gounnaret ; mes ur vouled a lazh hor jeneral karet. (Nos vaillants soldats combattent comme enragés, mais un boulet tue notre général bien aimé). L’armée française perd trois généraux dans cette affaire et la prise de Constantine se passe dans le sang : Na weler nemet ravach, Revin, dallentiz sot holl gavis a ra dezho en em zifenn betek en o ziaes enep ar fransizien. (On ne voit que ruines, un aveuglement général les fit se défendre contre les Français jusque dans leur maison).
Ces corps à corps terribles rendent les soldats français incontrôlables : Allas hon soudardet kounnaret e pep poent, a sailh ‘barzh an tier hag a vasakr kerkent kement holl a rañkoñtront, gwazed, gwregez, bugale, ar goad vel rivieroù dre holl a ruilhe. (Hélas nos soldats furieux envahissent les maisons et massacrent tout le monde, hommes, femmes et enfants. Le sang roulait comme des rivières).
Le Morlaisien Alexandre Ledan qui signe cette gwerz tragique légitime complètement cette conquête en prônant l’union dans l’empire colonial français : Bezomp holl gwir Fransizien hag unanet a galon ha ra vezimp bepred e peoc’h, en union ! (Soyons tous Français et unis de coeur que nous vivions toujours en paix dans l’unité).
Une histoire douloureuse qui peut expliquer en partie les difficultés actuelles des relations franco-algériennes
Pennad orin / Texte original
Troidigezh / Traduction
Prise de Constantine
Ville moyenne de l'Afrique
Par les Français vaillant
Le 13 novembre 1837
Sur l'air : Napoleon est revenu indemne de l'armée, dans sa main les palmes et une couronne de lauriers.
Bretons, venez m'écouter, je vous en prie,
Pour écouter un récit très intéressant ;
Qui vous rendra heureux et vous apportera la gloirer,
Parce que les Français sont encore victorieux.
Depuis qu'Alger a été pris par les Français,
Ils ont tout fait pour essayer d'arriver
A la paix et à l'union dans chaque partie du pays,
Mais malgré leur bon désir, ils ne purent y arriver.
Le gouverneur de Constantine, l'infâme Achmet-Bey
Cruel comme un tigre et méchant comme un loup,
N'écoutait aucun propos et n'entendait pas la raison :
Il n'avait pour conduite que la trahison.
Notre roi, indigné parce qu'il entendit,
Fit marcher sur Constantine une armée
Qu'il fit commander par le général Damremont
Comme un second Bayard, homme sans peur et sans reproche
L'armée marche la nuit et le jour
Avec beaucoup de fatigue, sans prendre de repos.
(...)
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
War ar rouedad / Sur internet
Lédan, Alexandre (1777-1855), “[Carnet n°8 de Aléxandre Lédan (1777-1855)],” Bibliothèque numérique du Centre de recherche bretonne et celtique (CRBC), pp 178-187, Qemeridiguez Constantin (Manuscrit)
Notice sur Kan. bzh, Quemeridigez Constantin
J. Olivier, Notice Catalogue bibliographique de la chanson populaire sur feuille volante, , N°933, (Annales de Bretagne, 1939.
Sur la prise de Constantine :
L'histoire par l'image
Wikipedia : siège de Constantine