1870 : Complainte sur la capitulation de la France (Brezel ar Pruss ha trahisonou ar Franç)
Il y a cent cinquante ans Napoléon III encerclé par les Prussiens à Sedan doit capituler. Un gouvernement provisoire proclame la République. On a recueilli 41 complaintes bretonnes sur ce conflit. En 65 couplets Yves Quiec de Plouguernevel raconte ses mésaventures sur feuilles volante Brezel ar Pruss ha trahisonou ar Franç (La guerre de Prusse et les trahisons de la France).
La gwerz (complainte) commence par un adieu déchirant au pays Adieu d’am farrez, adieu d’am c’hanton, Adieu d’am bro gant keuz ‘barz va c’halon, bremañ ez an a-dra serten da gomañs va mizer (Adieu ma paroisse, mon canton, mon pays, que de regrets dans mon coeur, maintenant commence ma misère.)
Son baptême du feu se fait au Bourget car les Prussiens encerclent Paris : Ouzhpenn 60 pezh kanon oa gant ar Brusianed, ha ganimp-ni ne oa nemet daouzek. Strakal a raent a-bep-tu ken a grene hor c’halon hag e oa ur fuzuilhadeg eno eus ar re vrasañ (Les Prussiens avaient 60 canons, et nous seulement douze. Ça tonnait de tous les côtés et la fusillade était à son paroxisme).
Les Français tiennent bon, mais voici qu’on leur demande de battre en retraite : Ha setu ur jeneral a glevemp o laret : « ret eo dimp rekuliñ dirak hon enemied ». Homañ zo ur trahizon a zo bet kalz c’hoazh. Gwashañ trahison zo bet a oa e kêr a Sedan, gwelet un ampereur o rentañ e gleze, O mezh ha dizenor ! ( Le général nous dit, « il faut reculer devant l’ennemi ». Voici une trahison comme on en voit beaucoup mais la pire fut à Sedan où on vit un empereur déposer son épée. Honte et déshonneur !).
Yves Quiec défend Paris assiégé dans des conditions horribles : Gant an naon hag an anoued e varv kalz tud, Kousket war an erc’h, ar skorn hag ivez e-barzh ar pri. Debret am eus kig kazh, kig ki (Beaucoup meurent de faim et de froid, couchés dans la neige et la boue. J’ai du manger de la viande de chat et de chien).
La désunion fait rage dans l’armée : les officiers sont partagés entre l’Empire, la Royauté ou la République, d’où la défaite française : Mar neump kollet ar brezel-mañ n’eo ket sur dre hon faot ; N’eus ket pell deus an Europ ni oa ar c’hentañ soudarded ha bremañ omp diskennet da beteg ar pevarvet. (Si nous avons perdu la guerre ce n’est pas de notre faute. Nous avons été trahis. Il y a peu, nous étions la première armée d’Europe, nous voici la quatrième).
Chaque Gwerz est une leçon d’histoire.
Pennad orin / Texte original
Troidigezh / Traduction
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Nicolas (Serj), Guerre de 1870 et commune de Paris dans les chansons sur feuilles volantes en Basse-Bretagne, Skol uhel ar vro, 2016, 118p.
Quiec (Yves), Brezel ar Pruss ha trahisonou ar Franç, https://fv.kan.bzh/chant-00121.html
Le Moing-Kerrand (Philippe), Le camp de Conlie, Les Bretons dans la guerre de 70
Le Mercier d'Erm (Camille), L'étrange aventure de l'Armée de Bretagne, Presse universitaire de Bretagne, St Brieuc 1970