Trésor de l’Argoat : autour du château de Kerjean, les terres les plus riches et les plus fécondes de Bretagne
Yves-Marie Laouenan a écrit le premier roman connu en langue bretonne, daté de 1834. Resté à l’état de manuscrit, il a été édité par le CRBC en 2004, accompagné d’une traduction d’Yves le Berre. Celui-ci dans sa présentation affirme “Rien d’aussi audacieux n’avait assurément jamais été écrit en breton.”
Yves-Marie Laouenan nous livre une description du Haut Léon à partir du château de Kerjean, dont l’histoire est le thème central du roman.
Pennad orin / Texte original
An edifis bras a zo diazezet war ur bladenn kaer e-kreiz ur blaenenn divent : tro-war-dro ez eus ur boulouard pavar-c’hornek uhel bras, gant pemzek kammed a ledander, gouarniset a venerezh ha toullet a veur a gasmat evit lakaat kanolioù. E pep korn ez eus un tour kornek goarniset a darzhelloù hag a granelloù.
Pignomp ur pennadig e beg an dourell hag e welimp ar vro holl a-wel evn en em zirollañ dirak hon daoulagad. Troit kentan ho selloù war-zu ar c’hreisteiz, hag arvestit ar wel divent-se pe hini ne finis nemet gant Menez Are e-unan. Remerkit e biz an tour elegant ha ker skedus a-zioc’h ar gêr vrav a Gastell ha pehini her rent c’hoazh kaeroc’h. Peger brav en em sav, en em aoz ha rent ar wel eus ar gêr-se laouen ! Kontemplit e nord ar mor bras a listri o pignat hag o tisken ar Vanch… Diouzh ar c’hostez-se, d’an daou benn ho tremmwel, e c’hellit en un taol lagad gwellout ar pinvidikañ hag an drusañ douar a zo e Breizh. Da gentañ a-gleiz emañ Plouneour-Traezh, ez eus un terouar ker founnus m’her galver ar baradoz douarek ; hag en tu dehou e kaver Rosko pehini a c’halver liorzh al louzou gegin eus ar Finister e pelec’h ar gwellañ legumach a veuri er parkeier Kazi da Bep pent eus ar bloaz, hep kempennadurez na masker ebet.
Kastell Keryann P.51
Troidigezh / Traduction
Cet édifice imposant est établi sur un beau plateau au centre d’une immense plaine : il est ceint d’un rempart quadrangulaire fort élevé de quinze pas de largeur, revêtu de pierres de taille et perc » de nombreuses casemates destinées à recevoir des canons. A chaque angle s’élève une tour carrée garnie de meurtrières et de créneaux.
Montons au sommet de la tourelle, nous y jouirons de la plus belle vue. Tournez d’abord vos regards vers le midi et admirez cette perspective immenche qui ne s’achève qu’à la montagne d’Arrée. Observez au nord-est la tour élégante et si jolie qui domine la charmante ville de St Pol de Léon et lui confère encore plus de lustre. Comme elle se dresse avec grâce, sa silhouette et égaie son aspect ! Contemplez au nord la multitude des navires qui remontent et descendent la Manche.
.. De ce côté là, d’une extrémité à l’autre de l’horizon, vous pouvez embrasser d’un seul regard les terres les plus riches et les plus fécondes qui soient en Bretagne. A gauche se trouve Plouneour-Trez ; c’est un terroir si fertile qu’on le nomme paradis terrestre et à droite c’est Roscoff que l’on appelle le potager du Finistère où les meilleurs légumes mûrissent dans les champs presque toute l’année sans nul artifices ni engrais.
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Laouenan Y.M.G., Kastel Ker Iann Koatanskour, Le château de Kerjean-Coatanscour, Trad. Yves le Berre, CRBC, 2004.