1940 : La bataille de Norvège vécue par un chasseur alpin nantais
En avril 1940, la France envoie un corps expéditionnaire en Norvège envahie par les Allemands. Jean Guerchet, chasseur alpin raconte son périple du départ de Brest : Bez e oa peder bag vras. Ne oa ket lec’h a-walc’h avat evit lojañ lodenn gentañ an arme-sikour en he fezh. Ret e oa lezel traoù e Brest hag eveljust ar pep pouezhusañ : n’o doa ket kemeret danvez tarzhañ a-walc’h, ne oa ket boued a-walc’h, karr ebet, kanol enep-nijerez ebet, mindrailherezoù hep karrigell, binvioù radio hep keflusker da grouiñ an tredan. (Il y avait quatre navires, mais pas assez de place pour le corps expéditionnaire. Il fallait laisser du matériel important à Brest, de la dynamite, de la nourriture, il n’y avait aucune voiture, aucun canon anti-aérien, des mitrailleuses sans chariot, des radios sans batteries).
Le 19 avril, le corps expéditionnaire français arrive dans le fjord de Namsos au nord d’Oslo. Aussitôt les Allemands attaquent : kouezhañ a reas bombezennoù a-varradoù, pemp-ha-pemp e-pad un hanter eur. Ar c’hanolioù a responte diehan. Hag an trouz gant heklevioù reier uhel ar fjord a oa ur spont e glevout. Ne oa tizhet na bag na nijerez. (Les bombes tombaient en chapelets de cinq pendant une demi heure. Les canons répondaient. Et le bruit amplifié par les parois du fjord était insupportable. Aucun bateau ne fut touché, aucun avion abattu.)
Les Français rejoignent les bataillons anglais tout autour de Namsos, attirant ainsi les bombardiers allemands. En quelques minutes la ville fut rasée.
Sous commandement anglais, les Français assistent impuissants à la déroute de leurs alliés : Ar Saozon n’o doa ket skioù na raketoù-erc’h ha ret e oa dezho chom e-kichen an hentoù. Hep raketoù-erc’h e kouezher betek ar c’hof en erc’h ken tev m’eo e Norvejia. Biskoazh ne voe komz diwar-benn implijout ar soudarded gall boaziet ouzh an erc’h.
(Les Anglais n’avaient pas de ski ni de raquettes. Ils devaient rester sur les routes. Sans raquettes on tombait dans la neige jusqu’au ventre. Jamais on évoqua l’idée d’employer les chasseurs alpins français habitués de la neige.)
L’attaque allemande le 12 mai en France changea la donne et le corps expéditionnaire fut rapatrié en France ou en Angleterre. Malgré quelques succès alliés, la campagne de Norvège fut un feu de paille. Kement-se evit netra ! (Tout ça pour rien) conclue à chaud notre Nantais rentré bien amer de son expérience nordique.
Pennad orin / Texte original
Troidigezh / Traduction
Et tout ça pour rien
Voici comment se termina l'expédition de Namsos : par un coup de traitrise. (En abandonnant l'armée norvégienne. N.du traducteur)
A quoi a servi cette bataille ? à détruire une ville de Norvège qui serait restée intacte sans la venue de l'armée de secours, à tuer des jeunes gens, à noyer beaucoup d'entre eux, à envoyer par le fond beaucoup de navires et de matelots. Et tout ça pour rien.
Et qui est responsable ? Les Anglais. Ils ont obligé la France à les suivre, comme d'habitude, et ils ont commencé un travail qu'ils ne pouvaient mener à bien, car ils avaient trop de fierté dans leurs coeurs et trop de désordre dans leurs esprits.
De retour de l'expédition de Namsos, je n'avais plus aucune confiance ni dans les Anglais ni dans les Français, et je pensais que la guerre allait mal tourner pour ces deux vieux peuples là.
Yann Mab Koïg
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Mab Koig (Yann), (Jean Guerchet), Abadenn Namsos, embannet ul lodenn nemetken a-nebeudoù e L'heure Bretonne (1940-1941)