Ar gourdeizioù : les douze jours qui annoncent le temps de l’année
En ce 30 décembre, nous sommes au cœur de ce que la tradition bretonne appelle les gourdeizioù, c’est àdire littéralement les surjours ou jours supplémentaires. Le premier à avoir noté cette tradition est Grégoire de Rostrenen dans son Dictionnaire breton-françoispublié en 1732 : « La qualité des douze premiers jours de l’an dénote celle des douze mois ».
Cette tradition est reprise en 1883 par le folkloriste L.F. Sauvé dans son « Kompod brezhonek evit ar bloavezh 1883 » (Calendrier breton pour l’année 1883). Il écrit ceci : Ar gourdeizioù dre bere e c’heller gouzout pe amzer vat pe amzer fall a vezo e pep hini deus ar mizioù e-pad ar bloaz (Les surjours où l’on peut savoir s’il fera beau ou pas pendant chacun des mois de l’année).
Cette tradition ne subsiste qu’en Cornouaille dans les années vingt nous apprend le linguiste François Vallée, mais il s’applique entre Noël et l’Épiphanie.
Dans le pays vannetais, la dernière semaine de l’année était appelée ar gozh sizhun(La vieille semaine). Gwezharal, en amzer gozh-gozh e vuzule an dud ar bloaz dre loariadoù. Met ne veze kavet nemet 354 deiz e-barzh ha re an heol a veze jedet 366 deiz. Ar pezh a rae daouzek deiz ouzhpenn evit peb bloaz.. (Dans les temps très anciens, on mesurait le temps en mois lunaires. On ne trouvait que 354 jours alors que l’année était mesurée sur 366 jours. Il manquait donc douze jours).C’est l’origine des gourdeizioù. Pour la vieille semaine vannetaise, l’écrivain Loeiz Herrieu avance l’hypothèse suivante Er bloaz keltiek ne oa kentañ nemet c’hwec’h miz bras, graet gant daou viz a oa sellet e-giz tad ha mamm. Ar c’hwec’h deiz-se a zeuas da vout un adsizhun (dans l’année celtique il n’y avait d’abord que six grands mois couplés. C’est pourquoi les six jours devinrent une semaine supplémentaire).
Le très sérieux linguiste Joseph Loth explique cette tradition européenne comme un emprunt aux Babyloniens ! Laissons les savants régler cette question pour se délecter des dictons populaires :
Kelien da Nedeleg, Skorn da bask(Des mouches à Noël, de la glace à Pâques)
Nedeleg sec’h, pask kailharek(Noël sec, Pâques boueux)
Ne vo ket leun ar solier, mar bez heol tomm e miz Genver(Le grenier ne sera pas plein s’il fait beau en Janvier), Pa vez tremenet dent Genver, e vez diskouloc’h an amzer, (Quand sont passées les chandelles de glace de janvier, moins glacial est le temps).
C’était avant le réchauffement climatique, pour l’avenir, il faudra inventer d’autres dictons !
Pennad orin / Texte original
Troidigezh / Traduction
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Van Gennep (Arnold), Le folklore français, p. 2728-2732, Éd. Robert Laffont, 1999
Saintyves (P), L'astrologie populaire..., Paris, Nourry, 1937, p.62-63
Duine Revue des traditions populaires, T. XXVI, 1911 P.360
Sauvé, Calendrier breton pour l'année 1883,
http://www.berose.fr/IMG/pdf/almanach_tp_1883.pdf
Herrieu (Loeiz), Kredenneu hor bro : er goh-suhun, in dihunamb N°319, genver 1938,
http://bibliotheque.idbe-bzh.org/data/cle_11_fevrier_2016/cle_14_18_fevrier_2016/cle17/cle_17/Dihunamb_1938_a-bezh_.pdf
D'arbois de Jubainville, Les gourdeiziou bretons, 1903:
https://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1903_num_47_4_19425
Loth, Revue celtique, 1903
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k64732422/f325.image.r=gourdeiziou
Cuillandre (Joseph), La droite et la gauche dans l'orientation bretonne, in Mélanges à Loth, P 263, https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1153314/f270.image.r=M%C3%A9langes%20%C3%A0%20Loth
Fison (J), La groah genuèr, in Revue des Traditions Populaires, t.XXVI, 1911, p. 43
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5835888d/f52.image.r=Frisongor-suhun?rk=21459;2
Le Doujet (Daniel), Gourdevezhioù, gourdeizioù goursizhun ha meteo, lenn en linenn