1919 : Gwir ar yezhoù (droits linguistiques et droits des peuples)
L’Armistice signé, le retour de l’Alsace et de la Lorraine dans l’État français suscite un débat politique sur les régions, que suit chaque semaine l’hebdomadaire Kroaz ar Vretoned(La Croix des Bretons). Maurice Barrès, président de la Ligue des patriotes réclame l’établissement d’un statut provincial qui rétablirait les régions. Cette prise de position fait réagir le maire du Hézo près de Vannes : En eskemm d’hon gwad a Vreizh, skuilhet ken puilh evit ar Frañs, e c’houlennomp ma vo lezet ganimp ha ma vo doujet hon c’hreansoù, hon yezh, hon gizioù.(En compensation du sang breton versé abondamment pour la France, nous demandons que nos croyances, notre langue et nos coutumes soient respectées ». Poincaré, et surtout le président Wilson font une déclaration sur les droits des peuples (Diskleriadur war gwir ar broadoù)qui génère une attente chez les régionalistes.
Le député morbihannais De l’Estourbeillon prend l’initiative d’une pétition pour réclamer un statut pour la région et la langue bretonne. A-bouez eo ma vo anavezet da beb bobl ar gwir da zerc’hel en e stumm pobl, ne vern pe en em gavfe e diabarzh pe en diavaez reizhadur ar stadoù (C’est important que chaque peuple garde sa personnalité à l’intérieur ou à l’extérieur d’une structure étatique).
Cette pétition reçoit des appuis de poids : le maréchal Foch, l’ensemble des évêques de Bretagne ; celui de Nantes, signe même en breton Gwir Vretoned ha gwir kristenien bepred (Vrais Bretons et catholiques pour toujours).
Le 4 mai 1919, lors de la création de la Société des Nations c’est la douche froide : Ne vo ket enskrivet « Gwir ar yezhoù ha frankizioù ar pobloù » e reoliadur Kevredigezh ar Broadoù, re damallus ouzh Bro C’hall a zinac’h anzav deomp-ni Breizh-Izeliz, hon yezh hag hon broadelezh keltiek (Le droit des langues et les libertés des peuples ne seront pas inscrits dans la charte de la Société des Nations car ce serait trop accablant pour la France qui refuse de nous reconnaître une langue et une nationalité celtiques).
Le traité de Versailles signé fin juin, est une nouvelle déception, puisque, si l’Alsace-Moselle garde des spécificités, il ne crée pas d’autres entités régionales. Les défenseurs de la pétition bretonne sont réduits à espérer que ce texte influence les hommes de pouvoir et qu’il porte ses fruits plus tard (ra bouezo war sperejoù an dud uhel, dezhañ da zougen kalz a frouezh en amzer da zont). Il faudra attendre 1972 avant que les régions aient un pouvoir politique.
Pennad orin / Texte original
A-bouez eo ma vo anavezet da bep pobl ar Gwir da zerc'hel en he stumm pobl, ne vern pe en em gavfe e diabarzh pe e diavaez reizhadur ar stadoù. Ret eo ma vo anzavet ha diskleriet splann gant ar c'hentañ "Feur-Peoc'h", dre e lakaat hiviziken da Reolenn sakr, Gwir didorrus pep pobl da gomz ha da zeskiñ, e pep frankiz, he yezh, da welet doujet, da viken ha diharzh, he gizioù hag he c'hreansoù, evit ma vez suraet dezhi, en amzer-da-zont, ar c'herzed frank gant hent reizh hec'h araokaat, war-zu ar pal dalc'het sonn atav eus he galvedigezh digant Doue !
Gwiriou ar yezou ha frankiziou ar poblou, in Kroaz ar Vretoned, N°310, 9/02/1919
Troidigezh / Traduction
Il est important de reconnaitre à chaque peuple le droit d'exister que ce soit dans un cadre étatique ou à l'extérieur. Il faut que l'accord de paix reconnaisse et écrive noir sur blanc comme une règle sacrée, le Droit indéfectible de chaque peuple de parler et d'apprendre sa langue, de voir respecter ses coutumes pour que soit tracé dans le futur la route du progrès vers le but auquel il a été appelé par Dieu !
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Goulven (Yann), La Bretagne et la conférence de la paix de 1919, in Emled N°6, 1946
http://bibliotheque.idbe-bzh.org/data/cle_78/Emled_1946_nA_6_.pdf
Estourbeillon (A), Gwiriou ar yezou ha frankiziou ar poblou, in Kroaz ar Vretoned, N°310, 9/02/1919