1858 : le Discours en breton de NAPOLEON III
En août 1858, Napoléon III et l’impératrice Eugénie font une visite de douze jours en Bretagne. L’empereur souhaite voir les Bretons tels qu’ils sont. Il ne sera pas décu : à Brest on lui présente « 50 couples de paysans en costume national dansant au son du biniou et de la Bombarde ». A Colpo dans le Morbihan, il est reçu par la Princesse Baciocchi et 6000 paysans sous un arc de triomphe où est inscrit en breton Deuet mat e Korn er Hoet (Bienvenue à Korn er Hoet). Mais c’est à Rennes qu’il fait sensation en prononçant un discours traduit en breton et placardé partout en Bretagne :
C’hoantek e oan d’en em gavout e-kreiz ar bobl breton, pehini dreist pep tra holl, a gar an aotoritez, a zo katolik ha den-a-vrezel. (Je voulais être au milieu du peuple breton, qui aime par-dessus tout l’autorité, la religion et l’ordre militaire).
Les Bretons étaient réputés monarchistes, ils firent pourtant un accueil enthousiaste à l’Empereur qui sut les amadouer : Ma n’eo ket an holl frañsizien heñvel en o doare, holl o deus un hevelep kalon. Fellout a ra dezho kaout ur gouarnamant start awalc’h evit ampech revolutionoù all ( Si la France n’est pas homogène dans sa nature, elle est unanime dans ses sentiments : elle veut un gouvernement assez stable pour enlever toute chance à de nouveaux bouleversements). En fin politique il met en avant sa vision d’une Bretagne prospère que tout candidat actuel pourrait reprendre mot pour mot : Gwelomp-ni heb dale ho douaroù labouret muioc’h-mui, hoc’h hentoù achuet, ho porzhioù-mor gwellaet, ar micherour hag ar marc’hadour en ur stad vat, ar micherioù hag ar skiantoù en enor (Que bientôt son agriculture se développe, que ses voies de communication s’achèvent, que ses ports s’améliorent, que son industrie et son commerce prospèrent, que les sciences et les arts y fleurissent). Et pour que ce programme économique réussisse, l’empereur exhorte le peuple en ces termes : Fellout a ra d’ar Vretoned gwellaat o bro, mirout o boazioù nobl, mirout o c’hustumioù dister, o frankiz hep he far, o feiz vat, o doujañs en bolontez Doue (Que les Bretons continuent à améliorer leur pays en gardant leurs sentiments nobles, leur simplicité de meurs, leur franchise proverbiale, leur fidélité à la foi et leur soumission à la volonté de Dieu). Cette tournée de propagande fut un grand succès, en témoigne l’exclamation du poète républicain Luzel qui termine son grand poème lyrique Armorpar un vibrant Doue ra viro Napoleon (Que Dieu préserve Napoléon) ! Ce sera vrai jusqu’en 1870.
Pennad orin / Texte original
Texte original et sa version bretonne à télécharger sur
http://bibliotheque.idbe-bzh.org/document.php?id=le-fureteur-breton-n-4-2434&l=fr
Troidigezh / Traduction
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Goblet (Yann-Morvran), un discours breton de Napoléon III, in Le Fureteur breton N°4, Avril-mai 1906
Cressard (Jacques), Le voyage de Napoléon III en Bretagne, in Bulletin et mémoires de la Société archéologique et historique d'Ille-et-Vilaine, t. XCVII, 1995
Poulain-Corbion (J.M.), Récit du voyage de l'Empereur et de l'Impératrice en Normandie et en Bretagne, Amyot, éditeur. 1858.