1917 : Jacques Le Cann : un breton chez les bolcheviks
Le canonnier Jacques Le Cann fut envoyé en Russie il y a cent ans pour intruire les soldats du Tzar. Spectateur privilégié de la Révolution russe il nous a laissé ses impressions en breton dans un carnet édité et traduit par Paolig Combot aux éditions Skol Vreizh.
Ar bloavezh 1917 en dije bezañ bet ur vintinvezh kaer da un amzer a liberte, a justis hag a zichadennerezh. Ar c’hentañ ravolt a roe lec’h da c’hedal traoù kaer : mes e oberourien n’oant ket kreñv a-walc’h. (1917 devait être l’aube d’un temps de liberté, de justice et d’émancipation. La révolte de février laissait espérer de belles choses : mais ses auteurs n’étaient pas assez solides).
Le breton de Logonna-Daoulas est à Moscou quand Lénine à la tête des Bolcheviks mets à mal le gouvernement provisoire libéral An trabaser bras Lenine zo deut da gaout galloud, an Aotrou Gwilhou boch he gasas d’e vro da lakaat gwashoc’h reuz. (Le grand agitateur Lénine est devenu puissant. Mr Guillaume le Boche le ramena dans son pays pour y semer une pagaille encore plus grande). Lénine téléguidé par l’Allemagne c’est la propagande anti bolchevik de l’époque. Ce que Le Cann reproche à Lénine c’est de vouloir faire la paix : D’ar re a gred ober bremañ ar peoc’h, evit brasañ mezh ar vro, ne c’hellfemp ket kas ar soudarded d’ar ger, rak an dud-se hep disiplin a rivinfe ar vro (A ceux qui voudraient la paix, à la plus grande honte du pays, nous ne pourrions renvoyer les soldats chez eux, car sans disciplines ils pilleraient le pays). Le breton fut le témoin des dissensions dans l’armée russe Un niver bras a ofiserien zo en em zistrujet hag un niver bras all a zo bet lazhet gant o soudarded… Raj zo enno ha dont a reont a-dreñv e-lec’h mont war-raok (Un grand nombre d’officier se sont suicidés ou ont été tué par leurs soldats. Ils sont enragés et préfèrent reculer qu’aller au front).
En novembre il raconte la prise du Kremlin par les Bolcheviks Rust kenañ eo ar stourmad : kanolioù, mintrailherez ha fuzulioù a strake gwashoc’h-gwasañ. Neuze eo echu tout rak ma eo ar bolcheviked ar vistri e partout ; ar benvideien o deuz aon ken a grenont. (Les combats sont très violents, canons mitrailleuses et fusils tirent de plus en plus. Puis tout s’arrête parce que les Bolcheviks sont les maîtres partout ; les riches tremblent de peur ). Le Cann reste en Russie jusqu’en septembre 1918 avec un goût amer Diwezhatoc’h, goude ur c’hantved, pa lenno bugale vihan ar re a vev bremañ an amzerioù trist ma vevomp, e stouint o daoulagad gant ar vezh hag e lavarint goustadik : Hennezh eo bloavezh an Draïson (Plus tard, dans un siècle, quand les petits enfants de ceux qui vivent ces temps tristes liront ces lignes, ils baisseront les yeux et diront doucement : C’était l’année de la trahison).La paix négociée par Lénine avec les allemands est vécue comme un coup de poignard dans le dos des alliés.
Son témoignage, rare, est précieux pour mieux connaître ce grand moment de l’histoire mondiale.
Pennad orin / Texte original
Troidigezh / Traduction
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Le Cann (Jacques), Un breton chez les bolcheviks, éd Skol Vreizh, Morlaix, N° 29, 1993 86 p.
Brezhoneg
Favereau (Francis), lennegezh ar brezhoneg en XXved kantved, Tom 1, p.420-431
Français
Favereau (Francis), Anthologie de la littérature bretonne au XXème siècle, Tome 1, P420-431.