1659 : Julien Maunoir père du breton moderne
Le jésuite Julien Maunoir est célèbre pour les 439 missions qu’il a prêchées en Bretagne au XVIIème siècle. On sait moins que ce Haut-Breton du pays de Fougères est le père du breton écrit moderne.
Julien Maunoir a battu de vitesse toutes les méthodes d’apprentissage de la langue, après une nuit de prière à la Chapelle de Ty-Mamm-Doue près de Quimper, il prêche en breton : Mallozh d’an diñsoù ha kartoù, Mallozh d’ar bal ha nosvezhioù, Mallozh d’ar gwin ha d’an dud fall.. arajet omp holl e-giz chas, Traenet omp holl gant Satanas, An naered hag ar serpanted a vezo birviken hor boued (Malheur aux dés et aux cartes, malheur aux bals et aux soirées, Malheur au vin et aux mauvaises gens… nous sommes tous enragés comme des chiens dans le sillage de Satan des reptiles et des serpents qui scelleront bientôt notre sort). On sait maintenant que ce burzhud (miracle) est à mettre plutôt sur le compte de la méthode d’apprentissage par immersion.
Le brillant prédicateur Jésuite s’aperçoit que le breton écrit continue à utiliser la tradition lettrée du Moyen âge. Le Père Maunoir voulait toucher le peuple. Il écrit donc une grammaire et un dictionnaire de breton avec de nouvelles règles orthographiques proches du breton parlé.
Les mutations des consonnes initiales sont une des caractéristiques des langues celtiques. Tous ceux qui ont suivi des cours de breton se sont délectés de ce point de grammaire très particulier. Les mutations n’étaient pas notées, Maunoir décide d’écrire comme on parle : ma tat (mon père) devient ma zad ; an mam (la mère) est écrit ar vam. Il remplace le ff par ân an haff (l’été) s’écrit an hân, henaff (l’aîné) devient henân. Il invente le c’h pour le distinguer de ch ainsi dech (hier) est écrit dec’h, par contre tach (clou) reste écrit et prononcé tach. Le C’H est devenu l’un des marqueurs forts du breton écrit, on le doit à Julien Maunoir.
Tous les Fañch de Bretagne doivent aussi le saluer pour avoir introduit le « tiltre » dans l’écriture du breton. Bonned aseñ (bonnet d’âne) portait déjà le tiltre (tilde) qui marquait l’omission d’un /n/ dans le Sacré Collège de Jésus, ouvrage de 1659 qui marque le début du breton écrit moderne. Ce signe ~ , a évolué ensuite, marquant la nasalisation tant en portugais qu’en breton, Il est à l’origine autant français qu’espagnol. Les rédacteurs de la circulaire du 23 juillet 2014 qui ont déclaré hors la loi le tiltre méritent donc un bonnet d’âne, et l’État Civil de Quimper mérite lui la bénédiction du Père Maunoir pour avoir légalisé nos petits Fañch.
Pennad orin / Texte original
Troidigezh / Traduction
Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin
Oberennoù /Oeuvres du Père Maunoir
1659 Le sacré collège de Jésus http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k133741n
1641 kenta kevrenn quenteliou Jesus, Adembannadur G. Milin, 1876, http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/items/show/9712
Miracles et sabbats, Journal du père Maunoir, Missions en Bretagne 1631-1650, Traduit du latin par Anne-Sophie et Jérôme Cras, Paris, Les éditions de Paris, 1997, 174p.http://www.persee.fr/doc/hes_0752-5702_1998_num_17_3_2211_t1_0534_0000_12
Brezhoneg
Even (Arzel), Istor ar yezhoù keltiek, l.1, Hor Yezh, 1972, p.178-179
Wikipedia : https://br.wikipedia.org/wiki/Juluan_Maner
Français
Le Menn (Gwenole), Les dictionnaires français-breton et breton-français du R.P. Julien Maunoir (1659), Skol, 1996.
Le Menn (Gwenole), Le père Julien Maunoir (1606-1683) et la langue bretonne, Bulletin de la Société archéologique du Finistère, tome CXIII, 1984
Deshayes (Albert), Histoire de la langue bretonne, évolution de la graphie, Ploudalmezeau, 2013, éd. Label LN, p 61-84.
Perennès (H.), Quelques auteurs de cantiques bretons : le vénérable Père Maunoir, Bulletin diocésain d'Histoire et d'Archéologie, 1925, http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http%3A%2F%2Fcatholique-quimper.cef.fr%2Fopac%2Fdoc_num.php%3Fexplnum_id%3D45
Dujardin (Louis), Le père Maunoir et ses écrits bretons, http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/c11a3e258f8ffa90e2f6db53b763e14a.pdf